
S’il a décidé de passer
par la voie de la révision constitutionnelle, c’est parce qu’une telle
disposition, adoptée par voie législative, serait certainement frappée
d’inconstitutionnalité en ce qu’elle poserait un problème de conformité au
principe de la garantie des droits proclamé par l’article 16 de la Déclaration
des droits de l’Homme et du citoyen.
De plus, elle se
heurterait à un principe de valeur constitutionnelle qui veut que l’on ne peut
priver les Français de naissance de leur nationalité, et serait également en
contradiction avec la législation européenne.
Faire d’une loi
potentiellement inconstitutionnelle un fondement de notre République me pose
quelques interrogations. Ce petit tour d’adresse constitutionnelle me donne l’impression
que le président de la République s’assoit un peu vite sur nos principes.
C’est pourquoi, j’attends
beaucoup du débat parlementaire du 3 février, et des réponses qui seront
apportées à cette occasion, avant de me prononcer définitivement.
Par exemple, je souhaite que
le gouvernement nous indique ce qu’il entend par «acte de terrorisme». Il
n’existe pas en effet de définition du terrorisme au plan international. Chaque État peut avoir son interprétation propre de cette notion.
J’aimerais également que
la garde des Sceaux nous éclaire sur l’impact d’une telle mesure qui me paraît
davantage symbolique et aucunement dissuasive.
Je crains que ce dispositif ne monte les
Français les uns contre les autres, les binationaux contre les uninationaux. Ce
faisant, il irait dans le sens de ce que recherchent les terroristes, nous
atteindre dans ce qui fait l’essence même de l’identité du peuple
français : ses valeurs républicaines !
Par ailleurs, de
nombreuses questions pratiques vont se poser et nous ne pouvons pas nous priver
de les aborder car une telle décision aura des conséquences vis-à-vis des
autres Etats.
Accepteront-ils que nous exportions nos terroristes après qu’ils
aient purgé leur peine sur notre territoire ? Comment réagirons-nous s’ils
adoptent la même mesure et nous renvoient un Français déchu de son autre
nationalité au motif qu’il a commis un acte de terrorisme ?
L’accueillerons-nous ?
Plus que jamais, nous
devons prendre le temps de la réflexion et du débat afin de ne pas nous laisser
influencer par l’horreur des événements et l’émotion.
En effet, la Constitution
est la norme suprême de notre République et nous ne devons y toucher qu’avec
précaution et parcimonie.
Pour moi, il faut
privilégier l’efficacité sur le symbole et l’unité sur la division.