La réforme territoriale qui nous est
proposée par le président de la République s’apparente à une sorte de grand "meccano des territoires".
Et si j’emboitais cette région des
Pays-de-la-Loire avec la région Centre ? Ou si je l’assemblais avec Poitou-Charentes ?
Et pourquoi pas la Bourgogne avec la Franche-Comté ?
Et si je transférais les pouvoirs des
conseils généraux aux assemblées intercommunales ? Et si…. Et si…et si ????
Tout cela donne l’impression d’un meccano
monté à la va-vite, sans réflexion profonde, sans critères objectifs et adaptés
pour un résultat bancal façon Tour de Pise.
Grand bâtisseur des régions, cela
ne s’improvise pas !
Je suis totalement favorable à une
évolution et à une simplification du mille-feuille administratif existant.
Le
constat des lourdeurs de cet enchevêtrement territorial est d’ailleurs assez
largement partagé et je considère qu’il est de notre responsabilité à tous
d’agir.
Je ne pense cependant pas que l’on puisse
traiter les territoires français avec autant de légèreté, d’amateurisme de
précipitation, dans les rapprochements nécessaires à plus de compétitivité,
d’attractivité et d’économies.
Cette réforme territoriale n’est pas un simple
jeu de Légo entre les mains du
président de la République qui fait et défait au gré de ses envies, des
conseils de ses amis…
Le chef de l’Etat n’est pas un monarque, mais le
représentant du peuple français. A ce titre, il doit entendre les
revendications concrètes issues du terrain.
Or, le président de la République veut aller
vite sur ce dossier, trop vite certainement et semble hermétique aux différents
avis des conseils régionaux issus d’une procédure démocratique.
Si le temps de la décision politique est très
court, il doit cependant tenir compte du temps plus long et mesuré des
territoires.
En effet, l’organisation territoriale française actuelle est le
fruit d’une évolution séculaire basée sur des critères historiques.Ainsi, par exemple, les régions ont été
créées en s’appuyant sur les départements eux-mêmes créés en 1791 sur le terreau
des vieilles provinces de l’Ancien Régime.
Il y a donc une certaine légitimité
à ce que la région des Pays-de-la-Loire soit rattachée à la région Bretagne.
Il faut agir, oui, mais agir efficacement
et de façon réfléchie. On ne peut pas redessiner une carte des régions
françaises à Paris, à la va vite et sur un coin de table ...
Notre région des
Pays de la Loire a ainsi changé trois fois de concubin potentiel dans la même
soirée à l’Élysée !!
De toute manière, cela n’apportera pas
grand-chose de redécouper la carte des régions et de supprimer les conseils
généraux si on n’a pas répondu au préalable à quatre questions fondamentales :
Quelle répartition des compétences veut-on
et qui fera quoi précisément ?
Quelles missions l’État doit-il continuer à
exercer sur les territoires et que déléguera-t-il définitivement ?
Quelles ressources fiscales pour permettre
aux collectivités d’exercer leurs compétences ?
Enfin, que vont devenir nos communes ?
La France compte actuellement 36 681 communes
et il est nécessaire d’ouvrir la réflexion dans deux directions :
Faut-il fixer un seuil de population en
deçà duquel une commune existante devrait se rattacher à une autre plus
importante, mais alors quid de l’avenir de nos territoires ruraux dans un tel
scénario?
Faut-il fusionner les communes qui
présentent une continuité territoriale, ce qui risque à contrario de poser la
question des territoires urbains denses ?
Voilà les questions qui restent en suspens
avec la réforme inachevée qui nous est présentée aujourd’hui et qui, comme pour
un beau montage de Légo nécessite de
la réflexion, du savoir-faire, de la cohérence et de l’humilité face au
chantier qui s’annonce.
A l’image des pièces de Légo, quand des régions ne peuvent ou ne
veulent pas s’emboiter, il n’est pas nécessaire de les forcer sous peine de
rupture.
Yannick FAVENNEC.